Parler de son jardin, c’est ouvrir les portes de sa vie intime, cachée. C’est partager avec autrui un pan de son histoire personnelle, c’est faire un bout de chemin ensemble. Pourtant nous tous rêvons de découvrir un coin sublime dans lequel règneraient paix et sérénité où à l’ombre d’un gigantesque platane, l’on pourrait se plonger dans un captivant roman en écoutant oiseaux et murmures de fontaines. N’est-ce pas l’image du paradis retrouvé, de l’éden biblique, de l’île exotique dont parlent si bien les grands voyageurs. Alors que dire de ce merveilleux endroit lorsque, au grand hasard de la vie, l’homme tombe sur un tel lieu. Pour mieux connaître les méandres qui ont conduit cet heureux personnage vers cet endroit magique suivez le guide !
En une suite de récits, de photos et de commentaires, je vais vous expliquer ce que fut « l’invention » des jardins de Magali.
Découverte : usine à cerises.
Rien, au premier abord, ne signalait l’existence d’un joyau au pied de cette falaise à Lauris, Vaucluse. Le village n’a aucune caractéristique digne d’attirer l’attention du touriste. Ce dernier empruntera bien la voie rapide ou traversera le village pour se précipiter vers Lourmarin, bourgade voisine connue pour la silhouette de ses églises et son château Renaissance. Il jettera, de la déviation, un œil rapide sur le contour échancré des maisons en haut de la falaise et pensera à ces décors hollywoodiens qui représentent le cadre d’un village du Moyen-Age. Il aura raison puisque Lauris a ses racines profondément ancrées dans la nuit des temps. Cette histoire pourra être lue dans une autre rubrique.
Revenons aux Jardins de Magali.
Sur une étendue d’environ mille mètres carrés, existait une usine à cerises, construite dans les années 1920, pour traiter les fruits avant de les expédier à Apt pour être confits. La vallée était recouverte à l’époque d’immenses vergers cultivés avec soin et qui permettaient aux agriculteurs de recevoir un supplément de revenus pour compléter la culture des asperges, artichauts et autres légumes. La Durance qui coule au pied du village, par son limon, fournissait richesse au pays.
Alors au printemps, c’était la cueillette et dans leurs paniers les femmes apportaient les cerises à l’usine de traitement. Des cuves en béton, remplies d'une macération à base d’acide chlorhydrique , attendaient les fruits. Le but était de les blanchir et de les attendrir de façon à retirer facilement les noyaux. C’est ce que faisaient les femmes qui revenaient les chercher pour les dénoyauter à la maison. Puis une nouvelle trempe dans un liquide soufré et les cerises partaient vers Apt.
Cette activité connut sa fin vers 1945 et l’usine fut abandonnée. Pendant des décennies, elle passa entre les mains de plusieurs propriétaires dont le dernier vivait à Marseille. Il venait de temps en autre avec sa famille dans ce qu’il appelait sa « jungle » puisque une dense végétation avait élu domicile sur les vestiges de l’usine. Rien ne pouvait se voir de la route principale puisqu’un mur dissimulait le terrain. L’entrée consistait en un portail délabré qui tenait avec du fil de fer. Derrière, monticules de terre coiffés d’arbustes, micocouliers et figuiers, et tas de gravats donnaient un aspect d’abandon. Un trou creusé au milieu du terrain servait de toilettes.
Au milieu de la jungle.
Derrière le mur, la jungle.